mercredi 12 décembre 2012

Entretien avec Aimé Onouka

Parcours, influences, goûts, projets à venir…le « père » de Nzela nous dit tout ! 


Comment est né Nzela ? 

 Le groupe est né en 1990 à Courbevoie en région parisienne. Il était à l’origine composé de quelques amis et moi-même. Au fil des années, de nombreux musiciens ont contribué à l’aventure Nzela, avant de devenir des pointures du reggae français…Je pense notamment au saxophoniste Guillaume Steppa qui a travaillé par la suite avec Sly and Robbie et Sinead O’ Connors, ou encore le bassiste Just Wody…On peut dire que Nzela a été une bonne école pour nous tous ! Je suis aujourd’hui le seul membre de la formation initiale.

 Qu’est ce distingue Nzela des autres artistes reggae ?

 Nzela est né avec la volonté de faire un reggae engagé. Au-delà de l’aspect politique et revendicateur qui ressort des textes et thèmes de Nzela, je dirais que c’est l‘aspect musical qui nous distingue : en tant que pionner du reggae africain, nous avons toujours été très influencé musicalement par la musique d’Afrique Centrale, notamment par la rumba congolaise d’où je suis originaire… J’appelle ça le reggae « Bantou », un reggae conscient et très attaché à ses racines, une manière propre et libre de faire de la musique.

 Quelles sont tes plus grandes sources d’influence? 

 Bonne question…j’en ai plusieurs….je dirais Fela Kuti, pour tout ce qu’il a apporté, mais principalement pour l’esprit de transe qu’il insufflait à sa musique, l’harmonisation des cuivres et son engagement politique. Il y’a John Lee Hooker également…j’aime bien son blues, son jeu mais aussi sa manière d’aborder directement les choses avec beaucoup de simplicité et de sensibilité…Il s’attaque en profondeur à des sujets sensibles en alliant maturité, courage et musicalité.

   

 Burning Spear, le gardien de la conscience Reggae aussi, pour son swing. Le folklore congolais aussi bien sûr…qui représente à la fois ma culture et une source d’inspiration très importante pour la musique de Nzela, que se soit dans les textes ou la composition. Enfin tous les styles, groupes et personnes qui transmettent un message éthique et authentique. C’est pour cela que Nzela est indépendant depuis le début : cela nous permet de faire une musique libre et sans concession.

 Quels artistes actuels apprécies-tu ?

 En ce moment j’écoute beaucoup MidNite, un groupe reggae originaire des Iles   Vierges. J’aime également beaucoup les californiens Groundation, pour leur   touche jazz et leur originalité. D’où vient le fort engagement de Nzela? La musique est un moyen pour moi de faire passer des idées et de dénoncer certains problèmes de société. C’est pourquoi j’attache autant d’importance aux thèmes qu’à la musique. Et cela dérange le pouvoir en place. Au Congo par exemple, beaucoup de têtes d’affiches sont corrompues et soutenues par le pouvoir, afin d’accéder à un certain réseau et une certaine exposition… On m’a souvent sollicité pour faire l’apologie ou citer un homme politique dans mes morceaux mais j’ai toujours refusé…C’est pourquoi j’attache autant d’importance à l’indépendance, seul moyen pour moi et Nzela de rester libre et exposer ces vérités aux gens. C’est ce que j’évoque dans le morceau « ils s’en moquent » par exemple: même si le pays va mal et que tout s’écroule, la seule préoccupation de certains dirigeants reste le pouvoir, le sexe et l’argent. Quel sont les projets à venir ? Pour le moment on démarche, on donne quelques concerts et on répète beaucoup. On se prépare pour un gros festival, le FESPAM qui aura lieu à Brazzaville du 13 au 20 Juillet prochain. On représente un peu l’Afrique en France donc on se doit d’être au top pour le retour au pays !

 Quelles sont les collaborations qui t’on le plus marqué ? 

 Je dirais tout d’abord la collaboration avec Winston Macnuff, véritable légende du milieu qui nous a fait l’honneur de collaborer avec nous sur l’album « Toyé ». Nous sommes le premier groupe avec lequel il a travaillé en France. Au-delà de l’artiste c’est une grande personnalité, on a eu l’occasion de faire ensemble des scènes en France. Suite à notre collaboration il a continué de travailler en France. Je suis aussi fier du travail que l’on a fait avec Mo’Kalamity, une chanteuse très talentueuse avec une voix à la Sade.
Autre collaboration marquante : le clip de « Dis Non », avec le célèbre guitariste congolais Michelino Mavatiku du groupe OK Jazz. C’est un morceau assez original ou r’n’b, reggae et rumba se mélangent. Malheureusement, on n’a pas eu le temps de composer d’autres morceaux ensemble.

Aimé Onouka
Aimé Onouka et Nzela sur scène

 La collaboration idéale ? 

 Sans hésiter David Hinds du groupe Steel Pulse, dont je suis fan. J’aimerais beaucoup collaborer avec Vaughn Benjamin, le chanteur de MidNite, pour son engagement politique et sa manière unique de chanter et placer sa voix dans les chansons.

Comment  écris-tu les chansons ? As-tu un procédé particulier pour trouver de l’inspiration et composer ?

 J’ai un processus de création assez particulier. A vrai dire il est très dur pour moi de me poser, trouver l’inspiration et commencer à composer ….Toutes les chansons que j’ai composé jusqu’à présent me sont venues en rêve la nuit ! Je dors, et au cours d’un rêve une mélodie me vient, parfois même pendant plusieurs nuits jusqu’à un point ou j’éprouve le besoin de « sortir » cet air de ma tête… je me mets alors à travailler autour de cette mélodie pour aboutir à une chanson. Il m’arrivait souvent de me lever en plein nuit pour enregistrer ce dont à quoi j’avais rêvé, pour être sûr de ne rien oublier…Bien sûr à la longue c’est assez fatiguant donc je ne le fais plus trop. J’ai d’ailleurs des tonnes de cassettes de mélodies prêtes à être travaillées!  Pour « Songs Of Rebels » par exemple, je rêvais à des enfants au bord d’une rivière à Makoua(Congo). Ces enfants poussaient des pirogues dans l’eau tout en chantant le refrain de « Songs Of Rebels ». Dans cette chanson, c’est Mo’Kalamity qui chante le refrain, mais si j’avais voulu être 100% fidèle à mon rêve, ce serait aux enfants de chanter ce refrain !

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